Période prolixe pour les chercheurs, le confinement a permis aux équipes de l’Etablissement Français du Sang de faire naître et mûrir de nombreuses idées à partir de recherches pré-existantes. C’est une quinzaine de projets qui ont été soumis à l’EFS national dans le cadre du programme de recherche anti-covid. Une équipe de Besançon s’est ainsi vu attribuer des financements d’amorçage dédiés pour leur projet considéré comme prioritaire – 3 au total ont été retenus.
Contrairement aux appels d’offres, notamment européens, lancés en pleine crise et appelant à des applications immédiates (production de masques, de solutions hydroalcooliques…), ces travaux menés au sein de l’EFS Bourgogne-Franche-Comté (Besançon) visent à identifier les cellules immunitaires qui reconnaissent le virus afin de pouvoir apporter des applications médicales à moyen et long terme.
Marina Deschamps et Christophe Ferrand, tous deux chercheurs au sein de l’Institut Right (UMR 1098) et de l’EFS, ont mis à profit leurs vingt années d’expérience dans le domaine de l’immunothérapie cellulaire antitumorale et des CAR-T cells pour imaginer un processus adapté au traitement du COVID-19.
Leur projet Covi-TRaC consiste à isoler les lymphocytes T afin de pouvoir les reprogrammer, les armer et les utiliser contre les cellules infectées par le SARS-COV2. Les recherches sont menées à l’appui de l’essai Coviplasm et d’autres équipes EFS.
Comment cela fonctionne-t-il ?
Chaque personne nait avec un pool de cellules immunitaires de base que l’on éduque toute notre vie : certaines personnes sont donc armées pour réagir face au virus et développent des « récepteurs T » adaptés.
Le projet Coviplasm récupère le plasma de ces patients convalescents pour l’étudier à des fins thérapeutiques. Grâce à ces prélèvements, Covi-TRaC vient isoler les lymphocytes T présents dans le sang pour identifier les gènes ayant reconnu la maladie, grâce à des technologies de biologie moléculaire. Ces gènes sont ensuite transférés dans des lymphocytes T « naïfs » pour qu’ils acquièrent la reconnaissance de la maladie et tuent la cellule infectée.
« Il s’agit d’une technique que nous utilisons depuis longtemps dans le domaine des CAR-T cells » expliquent les deux chercheurs qui sont venus de façon presque évidente « adapter leur recherche vers une nouvelle cible », cette fois-ci virale et non tumorale.
Ce process devrait donner de bons résultats en priorité pour les patients immunodéprimés, pour qui un vaccin ne serait pas applicable.
Vers quels résultats ?
Les recherches menées au sein de Covi-TRaC ont un double intérêt : à la fois thérapeutique mais d’abord scientifique puisqu’elles permettent de mieux comprendre la dérégulation du système immunitaire qu’entraîne le virus.
En effet, l’application de ce type de recherche jusqu’à la production d’un traitement est très longue. Marina Deschamps insiste « nous avons forcément tous envie de pouvoir apporter des nouvelles options pour les malades, mais nous n’avons pas de solutions miracles ». Et pourtant, en participant à la compréhension de la maladie et son fonctionnement, ils en alimentent la connaissance partagée au niveau mondial.